ETRE Esclave de ses désirs
La plupart d’entre nous, nous nous laissons entrainés et possédés par nos désirs.
Désirs d’argent, désir de pizza à l’emmental, désir d’amour, désir de commune spirituelle, désir de paix dans le monde, désir de pouvoir, désir sexuel etc etc. La liste est longue, infinie probablement, il suffit d’être créatif (rire)…avez-vous remarqué le nombre de désirs, petits ou grands qui peuvent passer dans notre tête ?
Ahhh le prochain iPhone 6…ou le prochain Samsung Alpha (pour ceux qui sont plutôt Android)….là encore…est-ce que cela va changer notre vie ? Nullement, nous le savons bien, c’est un gadget de plus…et pourtant regardez bien, l’énergie que la société déploie vis-à-vis des smartphones comme si cela était un besoin vital.
La pratique de la méditation ou l’attitude « mindfulness » nous permet de prendre conscience de tous nos désirs…petits ou grands, moraux ou immoraux.
Le mental passe d’un désir à l’autre…et peu importe le contenu du désir, la satisfaction est certes, parfois là, pendant un instant, mais elle n’est jamais profonde et durable.
Le maître spirituel Osho dit : « Le désir est le chemin qui vous amène à l’extérieur. Si votre mental continue de désirer, vous ne pouvez pas aller à l’intérieur ».
Dernièrement, j’ai plusieurs fois réalisé ce que dit Osho : un désir c’est comme une tension. Quand je désire, je me projette dans le futur, je ne suis plus dans le moment présent. Le désir n’existe pas et n’a jamais existé en quelques sortes, c’est ma fabrication mentale.
Contrairement à l’éducation occidentale qui nous enseigne l’ambition et la compétition (en suivant nos désirs justement), le Bouddha nous enseigne que la vie devrait être simple, sans complexité. Nous avons des besoins essentiels dans la vie. On a besoin d’habits, d’un toit, d’amour, de relations humaines…ce sont des besoins simples qui peuvent être satisfaits, comblés. Les désirs par contre ne sont pas simples, ils sont même inatteignables et je constate en observant ma propre vie que en effet, j’ai beau faire des efforts pour réaliser mes désirs, rien n’y fait. Mes désirs restent souvent inassouvis… et au fond, je reste insatisfait.
Et quand par hasard, j’arrive à assouvir un désir, l’insatisfaction est toujours là, même si elle est parfois plus subtile. Le romancier et essayiste français Jean Dutourf disait avec justesse : « Rien n’est plus triste qu’un désir assouvi. Il faut bien constater que maintenant que nous avons la lune, nous ne savons pas quoi en faire ».
Le voyage intérieur s’approfondit quand nous comprenons que les désirs n’amèneront aucune satisfaction profonde et véritable.
Peut-être pensez-vous : « Oui, mais aujourd’hui, avoir un smartphone est quasiment un besoin »…c’est vrai. Je préfère aussi manger une pizza à l’emmental plutôt que du pain sec et de l’eau. Ce n’est donc pas seulement ce que nous faisons qui compte mais il faut encore une fois percevoir le désir qui est derrière chaque acte. Apprécier une pizza ou se servir d’un nouveau smartphone est une chose, le désirer et se rendre malade pour satisfaire ce désir en est une autre.
Le désir sexuel est de ce point de vue intéressant à observer…C’est un des désirs les plus enracinés dans le corps humain et animal. Une étude scientifique américaine réalisée par des chercheurs de l’Ohio State University en 2013 et menée auprès d’étudiant(e)s âgé(e)s entre 18 et 25 ans montre que les hommes penseraient au sexe 34,2 fois par jour soit toutes les 28 minutes.
Et les femmes ? Elles ne pensent au sexe 18,6 fois par jour soit toutes les 51 minutes. Cette différence de 24 minutes expliquerait-elle pourquoi l’homme et la femme ont du mal à se comprendre ? Peut-être…
Une petite blague au passage lié à Mollah Nasrudin qui est un personnage légendaire du Moyen Orient dont les histoires drôles sont utilisées par les soufis pour illustrer la sagesse de leurs enseignements.
« Est-ce que tu m’aimes Mollah ? » chuchote la jeune fille.
« Bien sûr que je t’aime, » lui répond en chuchotant Mollah Nasreddin.
Alors, est-ce que tu te marieras un jour avec moi ? demande-elle ?
« NE CHANGEONS PAS DE SUJET ! » répondit Nasreddin.
Revenons aux désirs même si cette blague soufie est aussi directement liée aux désirs !
Le tantra et les enseignements spirituels contemporains expliquent que la liberté ce n’est pas de renoncer aux désirs, ni de les contrôler, c’est d’ailleurs là une grande différence avec les vieilles religions.
La vraie liberté c’est d’en être libre….ce qui signifie être libre de suivre un désir ou de ne pas le suivre justement. Pour cela, il faut déjà accepter nos désirs tels qu’ils sont. Tous ceux qui ont fait des stages de tantra ou pratiquent le tantra savent de quoi je parle.
« Si vous acceptez votre désir, un moment « d’absence de désirs » (le mot en anglais est desirelessness) est créé. Accepte-ton désir tel qu’il est. A cet instant-là, il n’y a plus rien à désirer. Désirer disparait. » Osho
La question des désirs n’est pas seulement essentielle pour la transformation de l’individu mais cela l’est aussi pour la société dans son ensemble. Il me semble que beaucoup de grands problèmes de société sont directement liés aux désirs.
A chaque élection présidentielle par exemple…le peuple suit un certain désir de changement. C’est le désir d’améliorer une situation personnelle et/ou collective. Le désir est « louable » me direz-vous, mais cela ne reste qu’un désir !
On peut constater que souvent les politiciens nous manipulent en surfant sur nos désirs. Car le principal désir d’un homme politique (à quelques exceptions espérons-le !) c’est d’être élu…et d’avoir du pouvoir, de la reconnaissance. Et pour être élu, il n’a pas le choix, il doit promettre de satisfaire à « notre désir de changement».
Les hommes politiques promettent des changements…un futur meilleur. Ce sont souvent des promesses qui sont impossibles à tenir. Et donc, le désir de changement reste insatisfait, il n’est pas comblé…et c’est pourquoi le peuple est souvent en colère, frustré.
C’est ainsi que la démocratie est devenue une sorte de bipartisme : la gauche – la droite, puis de nouveau la gauche et la droite etc…mais en réalité, rien ne change vraiment. Tout se passe surtout au niveau des désirs aveugles que nous avons tous plus ou moins au fond de nous.
Un jour, il est aussi possible qu’un populiste encore un peu plus fou que les autres (peut-être même un fasciste) puisse être élu car la non satisfaction des désirs du peuple a atteint sa limite. Le peuple en colère a besoin de trouver des coupables.
En réalité, aucun système politique et économique ne peut remplacer la conscience et même la démocratie a ses limites….l’être humain est plein de désirs et il est temps d’en prendre conscience et d’y amener de la lumière.
Je suis persuadé que l’heure n’est plus aux révolutions politiques mais à une évolution de la conscience.
Sur la nouvelle Terre, dit Eckhart Tolle, « le plaisir remplacera le désir comme force de motivation. Le désir émane de l’illusion de l’ego que vous êtes un fragment distinct et débranché du pouvoir sous-jacent à toute création, Par le plaisir, vous vous rebranchez sur le pouvoir créatif universel lui-même. »
Sans désirs, cette vie est un cadeau. Chaque moment se suffit à lui-même.
Le paradis est ici et maintenant.
par Emmanuel Moulin
directeur de la publication de Meditation france.
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