Quand les mouches se soûlent pour survivre
Les larves de Drosophila melanogaster consomment de l’alcool pour se protéger de parasites mortels.
On la croyait tout bonnement alcoolique. Eh bien, non ! La mouche Drosophila melanogaster, plus communément appelée mouche du vinaigre, pratique en réalité l’automédication. C’est du moins ce que suggèrent les travaux d’une équipe d’entomologistes américains de l’université Emory d’Atlanta. Selon les résultats de leur étude publiée dans la revue scientifique Current Biology, cette mouche, ou plus précisément ses larves, consomme des denrées hautement alcoolisées – fruits en putréfaction, raisins fermentés… – pour se débarrasser de parasites dangereux. Un peu comme vous traiteriez votre rhume avec un grog.
En effet, les guêpes ont la fâcheuse habitude de venir pondre leurs oeufs dans les larves des drosophiles. De sorte qu’en grandissant leur progéniture puisse facilement se nourrir sur la bête, dévorant de l’intérieur le pauvre petit de la mouche. Face à ce fléau fatal pour presque 100 % de ses larves, la drosophile aurait bâti une stratégie de survie sur l’un de ses avantages comparatifs : elle tient beaucoup mieux l’alcool que ses prédatrices ! Grâce à une enzyme spécifique, son organisme est capable de détoxifier l’éthanol de manière à ce que celui-ci puisse atteindre jusqu’à 4 % de sa nourriture, sans risque pour sa santé. Un don qui serait encore plus développé chez ses larves.
Adaptation
D’après les expériences menées par les universitaires, la consommation d’éthanol a deux effets : l’un préventif et l’autre curatif. D’une part, les guêpes semblent pondre moins d’oeufs dans les larves de drosophiles très alcoolisées. D’autre part, chez les larves de mouche déjà infestées, la consommation d’un haut niveau d’alcool aboutit à des problèmes de développement des parasites, des malformations parfois mortelles. Du même coup, la survie des larves de drosophiles contaminées s’en trouve sensiblement améliorée : environ 60 % des cas. Ce fait, les mouches de vinaigre en devenir semblent l’avoir intégré. Elles ont ainsi tendance à consommer plus d’alcool dès lors qu’elles se savent infectées.
Le hic est qu’une espèce de guêpe, spécialisée dans l’attaque de Drosophila melanogaster, tend à s’adapter. Ses larves résistent de mieux en mieux à l’alcool, de sorte qu’un petit de drosophile infecté, même complètement saoul, n’a plus que 10 % de chances d’en réchapper.
Le Point.fr – Publié le 21/02/2012 à 12:30

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