Faits médiuminiques
L’étude des faits médiumniques nous conduit à admettre trois stages de matérialisation :
1 – Au premier degré nous ayons la matérialisation invisible. Nous devons à priori l’admettre indirectement, si nous voyons des mouvements d’objets, que seul un organe humain invisible pourrait provoquer, comme je l’ai indiqué dans « Animisme et Spiritisme » ; ensuite à cause des sensations d’attouchement que l’on éprouve aux séances demi-obscures, et que l’on est tenté, d’attribuer à une main quoique celle-ci reste invisible. Enfin nous sommes confirmés dans cette supposition par les faits de la photographie transcendantale en général, et en particulier par certains cas de ce genre de photographie où la vue et le toucher de formes invisibles à l’œil normal sont confirmés par la photographie. Telles sont, par exemple, les photographies de Beattie, ainsi que celles de Mumler, où Mme Conant, le fameux médium américain, voit une apparition qui lui touche la main et où la photographie prouve que c’était bien véritablement une main appartenant à une figure invisible à l’œil ordinaire ; ou encore la photographie de M. Tinkham, sur laquelle on voit un petit bout de vêtement soulevé par une main invisible. La photographie transcendantale nous fournit la preuve de l’existence éphémère de formes réelles, objectives, que nous ne pouvons comprendre que par l’hypothèse d’une matérialisation commençante, encore invisible à nos yeux. La matière nécessaire est certainement empruntée au médium, mais sa quantité est si minime, que le degré de dématérialisation du médium n’est pas perceptible pour nos sens.
2 – Au deuxième degré nous avons le phénomène bien connu de la matérialisation visible et tangible, mais seulement partielle et incomplète. Ainsi l’apparition de mains a été constatée aux séances depuis le début du mouvement spirite. Elle se produisait en pleine lumière, pendant que le médium se trouvait au milieu des assistants. Lorsque plus tard on en arriva aux séances obscures, les mains continuèrent à être senties en même temps que le médium que l’on tenait tout le temps par les mains. Dans ces conditions on obtint aussi des matérialisations partielles : des têtes, des bustes, des figures plus ou moins fluidiques, mais dans l’obscurité. Quand enfin on commença à isoler le médium derrière un rideau ou dans un cabinet noir, on obtint des apparitions de mains, de têtes, de bustes qui étaient bien plus nettes et qui se montraient même avec un peu de lumière. D’après le principe de la théorie, ce phénomène de la matérialisation partielle doit correspondre à une dématérialisation partielle du médium, c’est-à-dire d’un de ses organes quelconques, ou à une dématérialisation générale plus ou moins inappréciable à nos sens.
On n’a pas pu faire sur le médium même qui, dans ces cas, se trouvait toujours tout à fait seul dans le cabinet, d’observations directes sur les changements qui pouvaient accompagner dans son corps la création des phénomènes. Mais en dernier lieu, dans le cas des séances avec Mme d’Espérance qui vont être traitées tout à l’heure en détail, nous avons obtenu la pleine confirmation de nos conclusions logiques : pendant que Mme d’Espérance se tenait, à une faible lumière, devant le rideau, et que des demi-matérialisations se produisaient derrière le rideau, par exemple des apparitions de mains et de bustes, plusieurs personnes ont constaté au moyen du toucher et de la vue, une demi-dématérialisation de son corps, c’est-à-dire celle de ses pieds et de ses jambes.
3 - Au troisième degré nous avons la matérialisation complète, c’est-à-dire celle d’une figure humaine visible et tangible complète, qui pour l’œil ne diffère en rien d’un corps humain vivant. Ce phénomène est le développement le plus élevé, le non plus ultra de la matérialisation, pendant laquelle le médium se trouve isolé dans l’obscurité, et généralement en transe. Une longue étude de ce phénomène força à reconnaître que lorsque l’on obtenait la complète matérialisation d’une figure humaine, cette matérialisation présentait indubitablement les traits du médium. De là résultèrent bien des causes de soupçons, de prétendus démasquages, etc. Toutes les tentatives pour voir le médium et la figure entière en même temps (pendant lesquelles on n’a malheureusement pas recherché l’état des deux corps, ceux du médium et de la figure) échouèrent à de rares exceptions près. Quand enfin on se fut assuré au moyen de garanties exceptionnelles (par exemple en tenant les cheveux du médium à l’extérieur du cabinet, ou bien en l’introduisant dans un courant galvanique) que le médium ne pouvait jouer ni consciemment ni inconsciemment le rôle du médium en personne, et que néanmoins la ressemblance de la figure et du médium était complète, ou au moins presque complète, (comme dans le cas de John King qui ressemblait à son médium Williams et de Katie King qui ressemblait à Miss Cook, son médium) on fut porté à admettre que le double ou le dédoublement du médium était le point de départ du phénomène. Mais cette expression nous conduit à une fausse interprétation ; car on peut comprendre ou se figurer que ce double est pour ainsi dire comme une moitié, un simulacre de son corps, tandis que son corps réel se trouve derrière le rideau.
En réalité ce n’est point une moitié, point un semblant de corps, mais un véritable corps complet, en chair et en os, qui est en tout ressemblant au médium ; bref, c’est le corps du médium, à s’y tromper. Qu’est donc devenu au même instant son corps réel ? On ne peut pourtant pas raisonnablement admettre que le médium ait, à un moment donné, deux corps complets absolument identiques. Nous avons déjà dit qu’il était, en somme, complètement logique d’admettre que le degré de matérialisation d’une apparition corresponde au degré de dématérialisation du médium ; si, en conséquence, la matérialisation de la forme humaine qui apparaît est complète, la dématérialisation du médium doit aussi être complète, ou tout au moins doit aller jusqu’à un degré tel qu’il pourrait devenir invisible pour nos yeux, si l’on voulait s’assurer de son état pendant ce phénomène.
En résumé, et en gardant constamment présente la thèse que toute matérialisation nécessite une dématérialisation correspondante du médium l’échelle complète des divers phénomènes de matérialisation se présenterait de la manière suivante :
1 – La matérialisation invisible primordiale correspond à une dématérialisation minima et invisible du médium, qui reste visible.
2 – La matérialisation visible, mais partielle, incomplète quant à la forme ou l’essence, correspond à une dématérialisation également partielle ou incomplète du médium qui est encore visible dans l’ensemble ou en partie.
3 – La matérialisation visible et complète d’une forme humaine entière correspond à une dématérialisation maxima ou complète du médium jusqu’au point où, de son côté, il devient invisible.

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